Société
Ce qu'attendent les professionnels de santé du nouveau gouvernement
07/10/2021 - 18:14
Aïcha DebouzaC’est la première fois que le secteur de la Santé fasse autant parler de lui au Maroc. Son personnel, mis à front depuis le début de la pandémie de Covid-19, a été confronté non seulement à la maladie, mais aussi à la faiblesse d’un système très ramolli. Il est bien vrai que le contexte sanitaire au Maroc a fait des avancées en termes de nombre d’acquis, mais il a également été marqué par des déficits relativement importants.
Améliorer les conditions de travail
Pour Omar Aït Oumelloul, membre du Syndicat national des médecins du secteur public, il est surtout question de conditions de travail "médiocres". Selon ses propos, permettre à un médecin ou tout autre personnel de santé de s’épanouir pleinement en exerçant sa profession et redoubler d’efforts nécessiterait que la tutelle améliore les conditions de travail des soignants, souvent jugées "désastreuses".
"En plus du salaire médiocre que nous touchons, nous manquons de sécurité au sein des établissements de soin, le personnel se fait injurier et a parfois même peur pour sa vie", se plaint Omar Aït Oumelloul. Il ajoute que ces conditions ont "poussé plusieurs médecins à la démission et à causer une pénurie dont le corps médical souffre énormément". Et qui dit pénurie du professionnel, dit "médiocrité de la qualité du service".
Et cette opinion est partagée par Fatima-Zahra Belline, coordinatrice du Comité information et communication du Mouvement des infirmiers et des techniciens de la Santé au Maroc (MITSAM). Elle propose de recruter plus de personnel afin de pallier à cette pénurie. "On aimerait bien que le ministère de la Santé recrute plus d’infirmiers sortis des institutions de formation reconnues. Il y a beaucoup d’infirmiers au chômage alors que nous sommes dans le besoin", martèle l’infirmière.
En effet, avec une carence d’environ 60.000 infirmiers et près de 32.000 médecins déclarés par l’Organisation mondiale de santé (OMS), le Royaume a dû affronter ce déséquilibre très fulgurant surtout avec la propagation du virus qui n’a à son tour pas arrangé les choses.
Reconnaissance du doctorat en médecine
Pour le corps médical, il est aussi important d’attribuer aux toubibs le statut de "docteur d’État" et les faire bénéficier des augmentations de salaire et des indemnités qui vont avec. "Comment voulez-vous qu’on continue de bien travailler si en 20 ans, on a eu uniquement droit à une augmentation de salaire de 1.000 dirhams, élevant ce dernier à 8.000 dirhams alors qu’un docteur d’État touche plus de 11.000 dirhams", tonne Omar Aït Oumelloul.
L’équivalence du doctorat en médecine au doctorat national ne date pas d’hier. Il fait même partie des points les plus urgents du dossier revendicatif des médecins du secteur public, demandant l’activation des dispositions de la dernière convention du 6 août 2020 concernant l’autorisation de l’indice 509 avec toutes ses indemnités.
Il convient de rappeler que les médecins du secteur public perçoivent des salaires selon l’indice 336 (salaire équivalent au diplômé d’un master) qui se situe autour des 8.000 dirhams. En revanche, l’indice 509, que réclament aujourd’hui les blouses blanches, leur permettra d’avoir un salaire minimum entre 11.000 dirhams et 12.000 dirhams, qui compenseront au moins leurs 10 ans d’études minimums.
Création d’un ordre des infirmiers
Par ailleurs, le mouvement des infirmiers et techniciens de santé du Maroc (MITSM) réclame quant à lui la création de l’Ordre national des infirmiers et techniciens de santé, la création du référentiel des emplois et compétences des métiers paramédicaux (REC), ainsi que le recrutement des lauréats des instituts supérieurs des professions infirmières et techniques de santé (ISPITS).
"On ne peut pas continuer de travailler dans l’amalgame et dans la désorganisation totale. La présence de plusieurs personnes qui rentrent en action dans le domaine de la santé (notamment les aides-soignantes, NDLR.) nous réconforte en tant qu’infirmiers puisque ça nous écarte des tâches qui ne sont pas les nôtres, encore faut-il définir avec précision, leur domaine d’action et surtout veiller dans les hôpitaux à ce qu’ils agissent et s’y limitent uniquement", s’exprime Fatima-Zahra.
Revalorisation de la prime de risque
Ces cadres de la santé réclament également l’augmentation de la prime de risque, ainsi que l’instauration de formations de base et de formations continues adaptées aux besoins réels des citoyens et des professionnels de santé. "Le médecin perçoit une prime de risque variant entre 2.800 et 5.900 dirhams, ce même risque dont font face les infirmiers qui n’ont droit qu’à 1.400 dirhams pendant toute leur carrière", dit-elle.
L’amélioration donc des conditions de travail, l’augmentation des primes, l’équivalence des doctorats, le recrutement du personnel et tant d’autres revendications hantent les esprits du corps soignant qui croise les doigts pour voir ses rêves se réaliser lors de ce nouveau mandat gouvernemental. "On a eu droit à plusieurs promesses non tenues, on espère voir du changement, et c’est tant bénéfique pour le citoyen que pour le personnel de santé", conclut Omar Aït Oumelloul.
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